8.3.1 Les phases du déroulement typique d’un incendie
Afin de pouvoir prendre des mesures de protection incendie au niveau de la construction, il est indispensable de connaître plus précisément le cours d’un incendie, c’est-à-dire les phases differentes du déroulement d’un incendie (voir Fig. 8.1).
Inflammation
Au contact de l’air, des parties des matériaux combustiblees sont portées à la température d’ignition.
Incendie en formation
Avec l’inflammation des matériaux échauffés jusqu’à la température d’ignition, le feu couvant passe à un feu de flammes. On appelle incendie en formation un feu localisé avec apparition de flammes.
Feu couvant
L’incendie se développe plus ou moins rapidement en fonction du type et de l’intensité de la source d’ignition ainsi que des matériaux combustibles impliqués. Dans la plupart des cas, l’incendie se propage tout d’abord relativement lentement à proximité des matériaux combustibles. Des points incandescents demeurent en partie presque invisibles. Lorsque de plus grandes quantités de substances combustibles sont impliquées, la quantité de chaleur libérée ainsi que la température augmentent alors quasi exponentiellement.
Explosion de fumées
Dans des cas défavorables, un mélange explosif peut se former entre l’air et des gaz, vapeurs ou poussières combustibles. Dès que la température d’ignition est atteinte, l’embrasement se produit en quelques fractions de secondes.
Saut de feu
Quand, durant un incendie en formation, la production d’énergie atteint un certain niveau par rapport à la masse combustible, la température augmente fortement. Il s’ensuit une gazéification massive des substances combustibles avec une forte production de flammes. L’incendie en formation se transforme alors en incendie généralisé.

Flash-over
Jusqu’au moment du flash-over, il y a de bonnes chances pour qu’un incendie puisse encore être circonscrit. Si les moyens d’extinction n’entrent en jeu qu’après cet instant, alors un sinistre total est généralement inévitable.
Incendie généralisé
Incendie généralisé alimenté par les matériaux:
Quand l’oxygène est disponible en suffisance, l’évolution de l’incendie dépend de la quantité et de la disposition des matériaux combustibles. Toujours plus de matériel prend feu et tant la quantité de chaleur que la température augmentent. Lorsque l’approvisionnement en combustible s’épuise, la puissance de l’incendie décroît progressivement jusqu’à ce que le matériel combustible soit en grande partie consumé.
Incendie généralisé alimenté par l’air:
Si l’apport d’air est limité, un manque d’oxygène peut se manifester après un certain temps. Le cours de l’incendie est alors retardé et le feu s’étouffe éventuellement. Un apport d’air soudain, par exemple par l’ouverture ou la destruction de fenêtres ou de portes, ranime le feu instantanément.
8.3.2 Modèles d’incendie
La description du comportement de systèmes porteurs entiers exposés eu feu est complexe et l’étude des processus thermiques et mécaniques dans le bâtiment sous exposition au feu est une branche de connaissances relativement nouvelle. Les approches actuelles sont en partie encore trop peu réalistes ou alors comportent des solutions qui demandent de trop grands efforts de calcul et trop de connaissances spécialisées pour une utilisation routinière en ingénierie.
La protection incendie préventive s’appuie jusqu’à maintenant et dans les cas normaux, sur le dimensionnement de chaque partie de construction pour une durée de résistance au feu déterminée d’après les exigences des normes et prescriptions de protection incendie [8.1 – 8.3]. Les influences réciproques entre parties de construction voisines ne sont toutefois pas prises en compte. D’une part, les dilatations et torsions des parties de construction dues à l’échauffement par l’incendie se produisent librement dans de rares cas et peuvent affecter leur comportement au feu. D’autre part, les parties de construction enflammées et les parties voisines qui ne le sont pas entrent collectivement en interaction « statique » et peuvent ainsi en peu de temps, c’est-à-dire dans une « durée de sécurité incendie », intercepter une diminution locale de la capacité portante dans un cadre limité. Les incendies dans les bâtiments à plusieurs étages demeurent heureusement la plupart du temps localement limités. Les contraintes supplémentaires dans l’état échauffé se superposent aux efforts mécaniques provenant des conditions d’utilisation.
Pour systématiser et simplifier la solution du problème, on recourt à une matrice d’appréciation avec les deux composants principaux modèle d’incendie et modèle porteur (voir Fig. 8.2).


Le modèle d’incendie décrit l’évolution temporelle de la température. Au niveau international trois variantes sont utilisées (voir Fig. 8.2):
- Courbe d’incendie normalisé (ISO-834) [8.8], texigée (B1): la durée de l’excursion de température dans la chambre d’incendie correspond à la durée de résistance au feu texigée = F(X) exigée par les normes et prescriptions de protection incendie (voir Fig. 8.3).
- Courbe d’incendie normalisé ISO (ISO-834) [8.8], teq (B2): dans le cas d’un incendie naturel (c’est-à-dire une évolution de la température au foyer de l’incendie prenant en compte la charge thermique, l’apport de ventilation, la géométrie du local ainsi que les propriétés des matériaux des parties de construction délimitant le compartiment coupe-feu → appelé incendie paramétrique), il existe un niveau de charge critique au-delà duquel l’élément de construction fait défaillance. En conséquence on définit ce que l’on dénomme une durée de résistance au feu équivalente ISO teq pour laquelle la capacité portante sous l’effet d’un incendie ISO est identique à la capacité portante minimale sous l’effet d’un incendie naturel (voir Fig. 8.4/8.5).

- Courbes d’incendie naturel (B3): modélisation numérique aussi réaliste que possible de l’évolution de la température des gaz à l’aide de la méthode des bilans couplés d’énergie et de masse pour
- incendies généralisés (B3a) avec une répartition plus homogène de la température des gaz d’incendie après le saut de feu dans l’espace et
- incendies localisés (B3b) avec des charges thermiques localisées dans de grands compartiments coupe-feu et caractérisés par une répartition inhomogène de la température des gaz d’incendie en raison des conditions locales de saut de feu (voir Fig. 8.6).

Pour les modèles porteurs, on distingue fondamentalement 3 niveaux:
- Subdivision de la construction porteuse en éléments simples (T1) – appuis, porteurs; les dilatations entravées ne sont pas considérées, les appuis encastrés sont simplifiés, charges complètes
- Subdivision de la construction porteuse en parties de système porteur (T2); tant les dilatations entravées que le comportement des appuis encastrés sont pris en compte, charges réduites
- structure porteuse globale (T3); charges réduites
8.3.3 Bilans thermiques d’incendies (voir [8.7])
La puissance calorifique libérée lors de la combustion d’un matériau doit être absorbée ou évacuée par l’entourage:
- Echauffement de l’air et des gaz de combustion: la masse de l’air ainsi que sa capacité d’accumulation de chaleur étant faibles, l’air enfermé s’échauffe rapidement (ceci n’est plus valable dans les grandes halles!).

- Renouvellement de l’air par tirage thermique: l’air froid aspiré par la dépression fournit de l’oxygène pour la combustion:
- Accumulation de chaleur: les matériaux de construction et le mobilier accumulent de l’énergie en fonction de leurs masses et de leurs chaleurs spécifiques:
- Echauffement des éléments environnants par convection et rayonnement thermique:

A: surface de toutes les ouvertures de fenêtres et de portes de la partie incendiée m2
λ~ 0,8 W/m · K et ρ · cp ~ 1,7 MJ/m3 · K
- Déperditions par transmission à travers les parois, plafonds et planchers:
- Déperditions par rayonnement à travers les ouvertures de fenêtres:
La température θB dans la pièce incendiée s’obtient à partir du bilan des flux de chaleur décrits ci-avant.
La combustibilité et le comportement au feu des matériaux de construction influencent principalement le cours de l’incendie dans sa phase préliminaire (feu couvant, naissance du feu), alors que la température dans l’espace incendié détermine avant tout l’échauffement des parties de la construction et ainsi le cours de l’embrasement.